Tony Duvert (né en 1945)

Le bon sexe illustré

BIBLIO

Paris : Éditions de Minuit, 1973
156 p. : ill., couv. ill. ; 22 cm
Notes bibliogr.
ISBN 2-7073-0003-9

TRADUCTIONS

El buen sexo ilustrado
Iniciativas editoriales , 1977

 

EXTRAITS  : 

Le texte en bleu est le passage repris dans l'anthologie de de Saintonge

Extrait 1

Texte au dos de l'ouvrage

Le bon sexe illustré exprime des opinions malveillantes sur la famille, le mariage, les bébés, le pouvoir des parents, les bonnes moeurs, la société de profit, l'idéologie épicière qui réglemente les plaisirs tolérés et les jouissances interdites - le tout en analysant cette "éducation sexuelle" anti-sexuelle, puritaine et nataliste qu'on vient de mettre au point à l'usage des mineurs.

Il faut reconnaître aux mineurs, enfants et adolescents, le droit de faire l'amour. De le faire, et non d'écouter les adultes en parler. Ce n'est pas une simple nécessité de liberté et de justice : c'est le seul remède possible aux fléaux de l'Ordre sexuel; que cette "éducaion" essaie de camoufler en endoctrinant les victimes.

Les victimes? Enfants, adolescents, mais nous aussi, nous tous, le présent et l'avenir de notre société. Ce sont ses répressions, ses peurs, ses prisons, ses interdits, ses abus les plus catastrophiques que l' "éducation sexuelle" enseignera et éternisera. Car, en France, on l'a seulement inventé pour que l'ordre règne encore mieux demain qu'aujourd'hui

(Edition de minuit, texte au dos).

 

Extrait 2

(…) Nous nous livrons à une grande variété d'actes, où ce qui est utile et productif rivalise avec ce qui est improductif et superflu : et il y a au moins autant de " dilapidation " que d'investissements dans notre économie corporelle. Comparée aux dépenses utiles, qui produisent ou qui captent quelques chose, la dépense " gratuite " (hors de toute théorie à son sujet) est très originale : fête, jeu, plaisir, elle n'engendre aucun " bien ", elle ne fructifie pas, elle ne se récupère et ne se transmet pas, elle ne travaille même pas à notre prospérité biologique ; et sa seule justification s'il lui en faut une, c'est la jouissance qu'elle procure.
Parmi ces dépenses, la plus facile, la plus abondante, la plus banale et la mieux réparée, c'est l'activité " sexuelle ". Il y a, entre notre capacité d dépense sexuelle et les besoins intermittents et très modestes, de la reproduction, une disproportion énorme : notre corps est, à ce titre, une machine érotique sous-déterminée, qui produit du désir " inutile ", du plaisir sans suite, de l'énergie sans fonction, perpétuellement dépensable et reconstituée. L'homme est, en permanence, pourvu d'un " excédent de sexualité " qu'il peut décharger n'importe où, et dont la dépense directe, à l'inverse des autres activités musculaires ou nerveuses, est une jouissance suffisante à elle-même.

Le bon sexe illustré
Editions de Minuit
p. 11

 

Extrait 3

(…) Il manque seulement une sexologie " révolutionnaire " ; peut-être parce qu'un système scientifique de la sexualité se confond toujours avec la défense d'un ordre moral précis, tandis qu'une pensée contestatrice n'a pas de modèle d'ordre à proposer, mais des formes d'ordre à abattre ; et, là où le savoir bourgeois voit des commandements de la " Nature ", elle dénonce les lois inqualifiables qu'une part de l'humanité fait peser sur elle. La sexologie construit une pyramide des phénomènes sexuels. (…) Toutes les conduites sexuelles sont en effet évaluées comme " techniques de gestion ", les unes aberrantes 'elles dilapident le capital pulsionnel), les autres recommandables (elles font fructifier avec orthodoxie la corporéité du sujet). La sexualité est ainsi comprise en fonction d'un seul critère : sa rentabilité. En cela, la sexologie copie à la fois les valeurs de la morale bourgeoise et celles qui servent à mesurer la santé d'une entreprise capitaliste. Ce mode d'appréciation refuse la notion de jouissance gratuite (et, faute de pouvoir la nier, il la stigmatise moralement).

Idem
p. 21,22

 

Extrait 4

(…) L'information sexuelle de l'enfant de 10/13 ans ne pose aucun problème pour qui fait l'amour avec lui. De très nombreux enfants cachent en effet à leur famille l'intérêt qu'ils portent aux choses du corps. L'enfant ne manifeste plus aucune curiosité pour les radotages gynécologiques de ses parents : c'est le plaisir qui l'intéresse exclusivement, et il a appris qu'il ne faut pas s'en vanter. En réalité, au cours de cette période, son désir s'est affirmé, concentré, et a pris la mesure des interdits extérieurs. Il cherche à s'assouvir en dépit du travail scolaire, et fréquemment grâce à la camaraderie et à ses apprentissages secrets, sinon exaltant : branlage, petits journaux, mots obscènes, voyeurisme, enculades, trou des dames, etc… Le dialogue entre les parents et l'enfant constitue un effort sournois pour consolider les aménagements répressifs qu'il avait subis de leur part dès sa petite enfance, et dont il tend à s'émanciper. La honte, la pudeur, la timidité l'aident un peu à se protéger des agressions parentales. Son problème essentiel, en effet, c'est la domination immédiate et le contrôle incessant que l'adulte fait peser sur lui. L'enfant de 10/13 ans a donc autan de sexualité qu'il le peut et si, désormais, il la dissimule soigneusement à ses proches, il est souvent à la disposition de beaucoup d'aventures clandestines, quelle que soit leur couleur.

Idem
p.38

 

Extrait 5

L'enfant qui se branle est troublé, il devient inquiet, il se sent abandonné, perd tout appétit pour le travail et s'isole de plus en plus. Traduisons. L'unique sorte de masturbation qui, parmi tous les plaisirs " solitaires " de l'enfance et de la pré-adolescence, peut provoquer cet état-là, c'est un branlage compensatoire et culpabilisé, une relation divisée, dégoûtée et honteuse avec soi-même, une jouissance qui se soumet à toutes les restrictions puritaines du bon sexe. Ce n'est pas un plaisir, mais une guerre répressive entre le sujet et ses organes. Inspiré par la frustration, il renforce et intériorise les lois qui la provoquent. Les fantasmes masturbatoires vont mettre en scène des stéréotypes d'assouvissement, un éros en clichés, des situations de plaisir insignifiantes et conformistes : un matériau de représentations ramassé parmi les lieux communs que véhicule le discours social sur le " plaisir ". En fait de vice, c'est plutôt de l'autoendoctrinement à coups de poignet. Fantasme courts, mise en images simplistes d'un désir qui, s'il avait le droit de s'exercer à cet âge, déborderait vite les stéréotypes reçus. Il faut beaucoup d'année de masturbation pour solidifier cette " culture " dans le crâne de quelqu'un, beaucoup d'années d'isolement sexuel de frousse et de honte obstinées. Viendra le moment où, faisant l'amour, on saura résister aux fantaisies immondes de certains partenaires, être le policier du lit, contrôleur du bon ordre des gestes, redresseur des rituels et des rôles. Au contraire, pendant l'enfance ou l'adolescence, même si on désire en clichés, ils sont mous, flous, purs substituts d'un concert inapprochable et inconnu : qu'on découvre celui-ci, et on révise bientôt ceux-là

Le bon sexe illustré page 89

 

Extrait 6

La masturbation accroît-elle ou réduit-elle la taille de la verge ?
On ne peut répondre oui à aucune de ces deux questions Les dernières expériences de savants américains ont prouvé que la dimension de la verge n'était pas en relation avec la taille ou la force physique du garçon.
A l'état de repos, des différences assez sensibles peuvent être notées d'un individu à l'autre. Mais, quand la verge est en érection, elles s'atténuent : la taille du pénis est alors à peu près la même chez tous les individus.
Les appréhensions quant à l'influence de la masturbation sur la taille de la verge ne reposent donc sur aucune donnée scientifique précise.

(…) Masters et Johnson… veulent décourager les curiosités malsaines, admirations glissantes, les humiliations châtrantes qui rendraient, paraît-il, peureux auprès des filles. Il faut aussi enseigner à celles-ci que tous les " pénis " sont pareils et donc les dissuader de jouer à l'oiseleur.
Ils ont donc observé le point suivant : plus une bite molle est longue, moins elle augment de taille, toutes proportions gardées, quand elle raidit. Exemple : les bites molles de 9cm environ fourniront des bites raides de 14-15 cm environ ; les bites molles de 12 à 15 cm fourniront des bites raides de 16.5 à 18 cm.
On voit que la différence de longueur entre bites molles ne s'efface pas quand elles raidissent : elle se transmet aux différences entre bites raides, en décroissant légèrement ou pas du tout.
Les dimensions, par conséquent, sont et restent très variables, dans tout les états d'âme du sexe-objet. Ces différences de dimensions, quel est leur éventail ? Du simple au double, et même plus. 90% des bites raides mesurent entre 10 et 22,5 cm selon les individus (adultes). Le 10% restant correspond aux micro ou macro exceptions.

Idem
p. 144-145