Princesse Palatine (1652-1722)

Lettres

 

EXTRAIT  : (L'extrait repris ici vient de : Pour tout l�amour des hommes : Anthologie de l�homosexualit� dans la litt�rature : IV � XVIIe si�cle de Michel Larivi�re.)

Le texte en bleu est le passage repris dans l'anthologie de de Saintonge

Extrait 1

Je dois vous dire que le parti de mes ennemis a mis en t�te � Monsieur de faire de son grand �cuyer le gouverneur de mon fils. Or comme je sais, avec toute la France, que cet homme est un des dr�les les plus m�prisables et les plus d�bauch�s du monde, j�ai pri� Monsieur de donner � son fils un autre gouverneur, et voici les raisons que j�ai all�gu�es. Il me semble que ce ne serait pas un honneur pour mon fils si l�on pouvait penser qu�il est la ma�tresse de d�Effiat, car il est certain qu�il n�y a pas de plus grand sodomite que lui dans toute la France, ce serait � mon avis un mauvais d�but pour un jeune prince comme mon fils, que de commencer sa vie par les plus affreuses d�bauches du monde. A cela Monsieur me r�pondit : Je dois avouer qu�en effet d�Effiat a �t� d�bauch� et qu�il a aim� les jeunes gens, mais il y a d�j� bien des ann�es qu�il s�est corrig� de ce vice. � Pourtant, dis-je � Monsieur, il n�y a que peu d�ann�es encore qu�un jeune et joli Allemand, qui �tait ici, s�est excus� aupr�s de moi de ne pas venir me voir aussi souvent qu�il le d�sirait, parce que d�Effiat le tourmentait trop lorsqu�il venait au Palais-Royal. D�Effiat n�est donc pas corrig� depuis aussi longtemps que le pr�tendent ses amis. Mais en supposant qu�il soit rest� quelques ann�es sans s�adonner � ce vice, comme son inclination l'y porte, je ne crois pas devoir lui confier mon fils unique pour le mettre � l��preuve, pour voir si M. le Grand Ecuyer a renonc� ou non � ses pages. Quant � ceux qui ignorent la conversion de d�Effiat, ils doivent le regarder comme un homme corrompu et perdu de vices, et cela lui ferait une mauvaise r�putation. Enfin, il me semble �trange qu�on veuille donner pour gouverneur � mon fils un dr�le... qui a toujours sa chambre au Palais-Royal pleine de putains et de jeunes gar�ons. Il donnerait, ma foi, de beaux exemples � mon fils ! �

 

Extrait 2

Ce qu�on dit du roi Guillaume n�est que trop vrai ; mais tous les h�ros �taient ainsi : Hercule, Th�s�e Alexandre, C�sar ; tous �taient ainsi et avaient leurs favoris. Ceux qui, tout en croyant aux Saintes �critures, n�en sont pas moins entach�s de ce vice-l�, s�imaginent que ce n��tait un p�ch� que tant que le monde n��tait pas peupl�. Ils s�en cachent tant qu�ils peuvent pour ne pas blesser le vulgaire, mais entre gens de qualit� on en parle ouvertement. Ils estiment que c�est une gentillesse et ne font pas faute de dire que depuis Sodome et Gomorrhe, Notre-Seigneur Dieu n�a plus puni personne pour ce motif... Le roi Guillaume change souvent de favoris, il en a un autre, dit-on, � la place d�Albermale. ll n�y a rien d��tonnant � ce que la reine, sa femme, n�ait pas eu de rivales de son vivant. Ceux qui ont ces go�ts-l� se moquent pas mal des femmes. Je suis devenue en France tellement savante sur ce chapitre que je pourrais �crire des livres l�-dessus... (1701)

 

Lettres choisies
par Olivier Amiel
(Mercure de France)