Stefan Zweig (1881 - 1942)

 

BIOGRAPHIE

Né à Vienne dans une famille de la grande bourgeoisie israélite, Stefan Zweig se passionne très jeune pour la littérature et le théâtre.

L'atmosphère cosmopolite de la Vienne impériale développe chez lui le goût des voyages et toute sa vie il parcourt les pays d'Europe, l'Amérique du Nord, le Mexique, Cuba, les Indes, Ceylan et l'Afrique.

A cette passion des voyages s'ajoute celle de la découverte des autres langues, et il devient en même temps qu'un grand écrivain, un grand traducteur notamment de Verhaeren, Romain Rolland, Baudelaire, Verlaine, Rimbaud, Keats, Yeats.

Il commence par publier des recueils de poèmes: les Cordes d'argent (1902), Couronnes précoces (1906).

En 1910, au cours d'un de ses nombreux séjours en France il rencontre Romain Rolland ; c'est le début d'une amitié qui durera toute sa vie.

Passionné de théâtre, il écrit des drames : Thersite (1908), le Comédien métamorphosé (1910), la Maison au bord de la mer (1911), qui marquent le début de son succès d'auteur dramatique. Mais sa pièce la plus connue reste Volpone (1927) adaptée de Ben Johnson, traduite en français par Jules Romains. En 1914, la première guerre mondiale inspire à Zweig de violentes protestations anti-militaristes dans des drames comme Jérémie (1916).

En 1917, Zweig, accompagné de sa première femme Friderike, se rend à Zurich pour la présentation de Jérémie. Il y rédige le Cœur de l'Europe, profession de foi pacifiste. De 1922 à 1939, il écrit ses nouvelles et romans les plus célèbres: Amok (1922), la Confusion des sentiments (1926), les Heures étoilées de l'humanité (1928), Vingt-quatre heures de la vie d'une femme (1934), Impatience du cœur (1938), la Pitié dangereuse (1939).

Il est aussi l'auteur de nombreuses biographies romancées dont celles de Marceline Desbordes-Valmore, Marie-Antoinette, Marie Stuart, Magellan, Fouché.

Établi à Salzbourg de 1919 à 1934, Zweig prend peu à peu conscience du danger national- socialiste. En 1933, Hitler est nommé chancelier et a lieu l'incendie du Reichstag.

C'est l'année de l'adaptation cinématographique de sa nouvelle Brûlant secret qui attise la colère des nazis voyant dans le livre et dans le film une provocation. Un autodafé de ses livres a lieu à Berlin. De nombreux écrivains comme Thomas Mann et Hermann Hesse s'exilent.

Après la rupture avec son éditeur et une perquisition de sa maison à Salzbourg, Zweig se rend en Angleterre pour mener à bien ses recherches sur Marie Stuart. Ce départ est interprété en Autriche comme une fuite et il est proscrit.

En 1940, Zweig obtient la nationalité britannique et se remarie avec sa secrétaire Lotte Altmann.

En 1937 paraît la nouvelle le Chandelier enterré et Souvenirs et Rencontres. La Pitié dangereuse paraît en 1938 simultanément en français, en anglais et en allemand chez des éditeurs hollandais et suédois et connaît un immense succès.

En 1939, Freud dont Zweig fut un proche, meurt à Londres ; ce dernier rédige et lit son oraison funèbre.

Après un séjour à New York, Stefan Zweig s'établit au Brésil en 1941 où il rédige le Joueur d'échecs et un essai biographique sur Montaigne.

En 1942, Zweig se donne la mort avec sa femme au lendemain de la chute de Singapour. Des funérailles nationales sont organisées.

Le Monde d'hier (son autobiographie) et le Joueur d'échecs seront publiés juste après sa mort. Balzac, Montaigne, ainsi qu'un roman inachevé, Ivresse de la métamorphose, paraîtront après la guerre

(source : http://www.comedie-francaise.fr/biographies/zweig.htm )

 

BIBLIOGRAPHIE

 

La confusion des sentiments (1926) : Roman  (Verwirrung der Gefühle)

 

BIBLIO

(Notes intimes du professeur R. de D. Traduit de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac)
Paris : Stock, 1929
In-16, 195 p. (R. J. K., 315.)

(notes intimes du professeur R. de D., traduit de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac)
[Paris,] : Stock (impr. Brodard et Taupin), 1960
In-16 (17 cm), 178 p., couv. ill. en coul. 1,95 NF. [D. L. 14750-60]
(Le Livre de poche. 609)

( notes intimes du professeur R. de D. / Stefan Zweig ; traduit de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac)
Paris : Stock, 1980
184 p. ; 18 cm
(Bibliothèque cosmopolite, ISSN 0224-5833 ; 19)
ISBN 2-234-01309-7 (Br.)

( notes intimes du professeur R. de D. / Stefan Zweig ; trad. de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac)
Paris : France loisirs, 1990
157 p. ; 20 cm
ISBN 2-7242-5111-3 (rel.)

( notes intimes du professeur R. de D. : roman / Stefan Zweig ; trad. de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac)
Paris : Librairie générale française, 1992
126 p. : couv. ill. en coul. ; 17 cm
(Le livre de poche ; 9521)
ISBN 2-253-06143-3 (br.)

( trad. de l'allemand par Alzir Hella et Olivier Bournac)
[Paris] : le Grand livre du mois, 1993
134 p. ; 23 cm
ISBN 2-7028-0157-9 (rel.)

(Le joueur d'échecs)
[Paris] : Au sans pareil ; [Paris] (22 rue du Sommerard, 75005) : [diff. EDDL], 1996
XV-259 p. : ill., couv. ill. en coul. ; 1996
(La bibliothèque des chefs-d'oeuvre)
(Trad. de : "Verwirrung der Gefühle" par Alzir Hella et Olivier Bournac et de : "Schachnovelle" par Jacqueline Des Gouttes)
ISBN 2-237-00101-4 (rel.)

(notes intimes du professeur R. de D. : roman / Stefan Zweig ; trad. de l'allemand par Olivier Bournac et Alzir Hella ; rév. de Brigitte Vergne-Cain et Gérard Rudent)
Paris : Librairie générale française, 1997
126 p. : couv. ill. en coul. ; 18 cm
(Le livre de poche ; 9521)
ISBN 2-253-06143-3 (br.)

 

Résumé :

Au soir de sa vie, un vieux professeur se souvient de l'aventure qui, plus que les honneurs et la réussite de sa carrière, a marqué sa vie. A dix-neuf ans, il a été fasciné par la personnalité d'un de ses professeurs; l'administration et la recherche inconsciente d'un père font alors naître en lui un sentiment mêlé d'idolâtrie, de soumission et un amour presque morbide. (source : http://www.motalabouche.com/catalogue/livre/data/zweig-confusion-sentiments.htm )

EXTRAIT

(Dans La confusion des sentiments, roman publié en 1926, Stephan Zweig décrit les angoisses d'un jeune étudiant, amoureux de la femme de son professeur. Ce dernier lui témoigne une grande amitié mais le jeune homme va bientôt comprendre que son maître, tant admiré, est un homosexuel.) 

 ...

Tu es jeune, tu es limpide et beau… tu étais près de nous… comment ne t'aurait-il pas aimé, toi… toi, beau et jeune comme tu es, comment ne t'airait-elle pas aimé…? Je…"

Soudain sa voix se mit à trembler et il se pencha près de moi, si près que son souffle glissa sur mon visage. De nouveau je sentis le chaud enveloppement de ses regards, de nouveau je sentis cette étrange lumière, comme… comme dans ces rares et singulières secondes qui se produisaient entre lui et moi. Il s'approchait toujours davantage.

Et puis il murmura tout bas, à peine si ses lèvres remuèrent: "Je… Je… t'aime, moi aussi."

[…] Une ombre obscurcit son visage. "Me méprises-tu, maintenant? Demanda-t-il tout bas. Te suis-je maintenant antipathique?"

Pourquoi ne trouvais-je alors aucune parole? Pourquoi me bornai-je à rester là muet, comme indifférent, embarrassée, engourdi, au lieu de m'élancer vers cet homme plein d'amour et de lui ôter son souci erroné?

[…] Maintenant je comprenais avec une atroce clarté ce qu'avait été le sauvage chaos de cette nuit où, noctambule de ses sens tout-puissants, il avait monté l'escalier grinçant, pour ensuite se sauver lui-même et sauver notre amitié, au moyen d'un mot offensant.

[…] Cette voix dans l'obscurité, cette voix dans les ténèbres, ah! comme je la sentais pénétrer jusque dans la structure la plus intime de ma poitrine! Un accent résonnait en elle comme je n'en avais jamais entendu auparavant, et comme je n'en ai jamais entendu depuis, - un accent venu des profondeurs que n'atteint point le destin des hommes moyens. Un être humain ne pouvait parler de la sorte qu'une seule fois dans sa vie à un être humain, pour se taire ensuite pour toujours, ainsi qu'il est dit dans la légende du cygne, qui seulement en mourant peut, une unique fois, hausser jusqu'au chant la raucité de son cri.

[…] Brusquement, la voix se tut et il n'y eut plus entre nous que l'obscurité. Je savais qu'il était près de moi. Je n'avais qu'à remuer ma main et, en la tendant, je l'aurais touché. Et j'éprouvais un puissant désir d'être secourable à sa souffrance.

Mais il fit un mouvement, la lumière vibra.  Je vis se lever du siège une figure lasse, vieillie, tourmentée; un vieil homme épuisé vint lentement à moi.

"Adieu, Roland… maintenant plus un seul mot entre nous. Tu as bien fait de venir… et il est bon pour nous deux que tu t'en ailles… Adieu… et laisse-moi… te donner un baiser en cet instant suprême."

Comme soulevé par une puissance magique, je m'inclinai vers lui. Cette clarté confuse, qui d'habitude était comme arrêtée par une trouble fumée, brilla maintenant dans ses yeux : une flamme brûlante monta brusquement en eux. Il m'attira à lui, ses lèvres pressèrent avidement les miennes, en un geste nerveux, et dans une sorte de convulsion frémissante il me tint serré contre son corps.

Ce fut un baiser comme je n'en ai jamais reçu d'une femme, un baiser sauvage et désespéré comme un cri mortel. Le tremblement convulsif de son corps passa en moi. Je frémis, en proie à une double sensation, à la fois étrange et terrible : mon âme s'abandonnait à lui, et pourtant j'étais épouvanté jusqu'au tréfonds de moi-même par la répulsion qu'avait mon corps à se trouver ainsi au contact d'un homme,- affreuse confusion de sentiments qui faisait durer cette seconde, pendant laquelle je ne m'appartenais plus, à tel point que j'en avais perdu la notion du temps.

Alors il ma lâcha; ce fut une secousse comme quand un corps se désarticule sous l'action de la violence; il se tourna péniblement et se jeta sur son siège, ne me montrant que le dos : durant quelques minutes son corps immobile resta droit, n'ayant devant lui que le vide. Mais peu à peu sa tête devint trop lourde; elle se pencha légèrement, cédant à la fatigue et à l'épuisement, puis, semblable à un poids trop grand qui pendant longtemps a oscillé dans une position instable et qui tout à coup s'abat dans la profondeur, son front incliné tomba pesamment sur la table de travail, en rendant un son mat et sec.

Une compassion infinie s'empara de moi. Involontairement je m'approchai, mais alors son dos affaissé se redressa soudain convulsivement encore une fois et, se retournant vers moi, d'une voix rauque et sourde, il poussa comme une sorte de gémissement menaçant, à travers ses mains crispées qui étaient posées devant sa figure : "Va-t-en… va-t-en… non… ne t'approche pas… pour l'amour de Dieu… pour l'amour de nous deux… va-t-en, maintenant… va-t-en!"

Je compris et en frissonnant je reculais : comme un fugitif je quittai alors ce lieu bien-aimé.

Jamais je ne l'ai revu. Jamais je n'au reçu de lui ni lettre ni nouvelle. Son livre n'a jamais paru, son nom est oublié; nul ne se souvient de lui, en dehors de moi. Mais encore aujourd’hui, comme autrefois le garçon ignorant que j'étais, je sens que je ne dois davantage à personne qu'à cet homme, ni à mon père ni à ma mère avant lui, ni à ma femme et à mes enfants, après lui, et que je n'ai aimé personne plus que lui.

 

 

Brûlant secret 

 

BIBLIO

(Brûlant secret [″Brennendes Geheimnis″]. Conte crépusculaire [″Geschichte in der Dämmerung″]. La Nuit fantastique [″Phantastische Nacht″]. Les Deux jumelles [″Die gleich-ungleichen Schwestern″]. Texte français d'Alzir Hella)
Paris : B. Grasset, 1945
In-16, 312 p. (R. J. K., 312.)

(trad. de l'allemand par Alzir Hella)
Paris : B. Grasset, 1986
301 p. ; 19 cm
(Les Cahiers rouges, ISSN 0756-7170)
ISBN 2-246-35882-5 (Br.)

 

VIRTUEL