Albert Camus

Repères biographiques

L'enfance

     Albert Camus est né le 7 novembre 1913 à Mondovi, petite ville située dans l'ouest de l'Algérie, près de Bône (actuelle Annaba). Son père était ouvrier dans une exploitation vinicole. Sa mère Catherine, née Sintès, d'origine espagnole, était presque illettrée. En 1914, éclate la Grande Guerre. Le père de Camus meurt le 11 octobre des suites d'une blessure à la bataille de la Marne ; il est enterré à Saint-Brieuc. Dans son dernier roman inachevé, Le Premier Homme (Gallimard, 1994), Camus racontera sur un mode presque autobiographique la "recherche du père" au cimetière de Saint-Brieuc. Mme Camus vient s'installer à Alger, dans le quartier populaire de Belcourt, avec ses deux fils, Lucien, l'aîné, et Albert. Celui-ci bénéficie de l'attention de son instituteur, M. Germain, qui lui permet de devenir boursier et d'entrer en classe de 6e au lycée d'Alger.

L'adolescence

     Grâce au lycée, mais aussi à son oncle, le boucher Gustave Acault, Camus développe son goût pour la lecture. Il nourrit pour le football une passion qui ne le quittera jamais ; il sera le gardien de but de l'équipe junior du Racing Universitaire d'Alger. A seize ans, il est déçu par Les Nourritures terrestres, d'André Gide (dans Noces, il dira qu'il trouve trop "cérébrale" la façon qu'a Gide d'exalter le corps). Il a dix-sept ans quand il subit les premières atteintes d'une tuberculose dont il ne se guérira jamais tout à fait. En classe de terminale, il a pour professeur de philosophie, Jean Grenier, qui restera son ami. Il le retrouve en classe de Lettres supérieures (hypokhâgne). En 1933, Jean Grenier publiera Les ëles, qui influenceront les premières ?uvres de Camus et que celui-ci préfacera en 1959.

Premiers engagements, Premiers crédits

     En 1933, Camus poursuit ses études à la Faculté des Lettres d'Alger. C'est cette année-là que Hitler accède au pouvoir ; Camus militera bientôt au Mouvement antifasciste. En 1934, il se marie avec une jeune fille belle et instable, Simone Hié (ils divorceront deux ans plus tard). La même année, il adhère au Parti communiste algérien, où il occupe des fonctions de propagande dans les milieux musulmans. La date à laquelle il le quitta ne nous est pas connue (1935 ? 1937 ?). En 1935, Camus commence à écrire L'Envers et l'Endroit, suite de courts textes (entre l'essai et la nouvelle) où il fait entendre les "voix du quartier pauvre". En 1936, il rédige un Diplôme d'études supérieures (actuelle maîtrise) intitulé Métaphysique chrétienne et néo-platonisme. Il fonde la troupe du Théâtre du Travail (qui deviendra Théâtre de l'équipe) et écrit pour elle, en collaboration avec des amis, Révolte dans les Asturies. Il joue lui-même dans la troupe, ainsi que dans celle de Radio-Alger. En 1937, il devient journaliste à Alger républicain où il s'occupe particulièrement des procès politiques en Algérie. Sa santé lui interdit de se présenter à l'agrégation de philosophie. L'Envers et l'Endroit est publié à Alger (éditions Charlot). Il commence un roman, La Mort heureuse, qui restera inachevé (Gallimard, 1971).

Les premiers chefs-d'oeuvre et la guerre

     En 1938, il commence à écrire Caligula, pièce qui ne sera représentée que sept ans plus tard, et L?Étranger. Ses lectures de Nietzsche et de Kierkegaard, entre autres, préparent l?élaboration du Mythe de Sisyphe.
Le 30 septembre, sont signés les accords de Munich, qui donnent aux démocraties occidentales le trompeur espoir d?une paix durable avec Hitler.
Celui-ci les fait déchanter, annexant brutalement la Tchécoslovaquie en mars 1939. Cette année-là, Camus publie Noces, et mène une enquête sur la misère en Kabylie. Le 3 septembre, la France et l?Angleterre déclarent la guerre à l?Allemagne.
Camus passe le début de l?année 1940 à Oran et épouse Francine Faure (une Oranaise) qu?il a rencontrée en 1937. Il quitte l?Algérie pour la métropole, travaille au journal Paris-Soir, termine en mai L?Étranger. Au moment de l?invasion allemande (mai-juin), il se replie sur Clermont-Ferrand, en zone libre, où il rédige la première partie du Mythe de Sisyphe.
En 1941, Camus commence à songer au roman qui deviendra La Peste et milite dans des mouvements de résistants. En 1942, son état de santé l?oblige à aller se reposer à la montagne, près de Saint-Étienne. L?Étranger paraît en juillet. Les Alliés débarquent en Afrique du Nord, le 8 novembre 1942, et les Allemands ripostent en occupant la totalité du territoire français, Camus se sait alors pour longtemps séparé de sa femme, demeurée en Algérie.
Le Mythe de Sisyphe paraît en 1943. À la fin de l?année, Camus devient lecteur chez Gallimard. Il fréquente Gide, Aragon et bientôt Sartre. En juin 1944, Le Malentendu est représenté à Paris. Deux mois plus tard, la capitale est libérée. Camus prend, avec son ami Pascal Pia, la direction du journal Combat, à Paris.

De l'absurde à la révolte

     Le 8 mai 1945, l?armistice est signé en Europe ; mais la guerre ne prendra vraiment fin qu?en août, après les bombardements américains sur Hiroshima et Nagasaki. Camus se rend en Algérie pour enquêter sur les révoltes musulmanes violemment réprimées, qui ont suivi l?armistice (à Sétif notamment). Caligula est représenté pour la première fois à Paris en septembre. Quelques jours auparavant, Francine Camus a mis au monde des jumeaux : Jean et Catherine.
Camus écrit « Remarque sur la révolte », point de départ d?une réflexion qui aboutira à l?essai intitulé L?Homme révolté. Au cycle de l?Absurde (comprenant principalement Caligula, L?Étranger, Le Mythe de Sisyphe) fera en effet suite le cycle de la Révolte.
En 1946, Camus voyage aux États-Unis et achève La Peste. Ce roman, publié en juin 1947, connaîtra un immense succès, mais contribuera à donner à Camus une réputation de « saint laïque » ou de « juste » qui l?agacera toujours.
Camus continue de travailler pour le théâtre, à ses yeux « le plus haut des genres littéraires et en tout cas le plus universel ». Mais L?État de siège, écrit en collaboration avec Jean-Louis Barrault et créé à Paris en octobre 1948, est un échec. Les Justes connaîtront, en décembre 1949, un meilleur succès.
Sa mauvaise santé freine la composition de L?Homme révolté, qui paraît en octobre 1951 et va déclencher une polémique avec Sartre et ses amis de la revue "Les Temps modernes". Camus en sortira profondément blessé.

Déchirement et amertumes

     En août 1952, Camus rompt définitivement avec Sartre. Cette année est, expliquera-t-il lui-même, une date charnière. Il conçoit de nombreux projets: un roman intitulé Le Premier Homme, des nouvelles (qui seront finalement celles de L?Exil et le Royaume) et, pour le théâtre, un « Don Juan » à peine ébauché et une adaptation des Possédés, de Dostoïevski, qui sera représentée sept ans plus tard.
En juin 1953, des ouvriers s?insurgent à Berlin-Est. Il s?agit d?une révolte dirigée contre un pouvoir stalinien qui prétend représenter la Révolution. « Quand un travailleur, quelque part au monde, dresse ses poings nus devant un tank et crie qu?il n?est pas un esclave, que sommes-nous donc si nous restons indifférents ? » déclare Camus.
En 1954, il traverse une grave crise morale ; il publie L?Été (textes dont certains remontent à l?année 1939), mais il n?écrit rien de nouveau. En novembre, l'Algérie connaît de « graves événements », nom que la France donnera longtemps à ce qui est en fait une guerre d?indépendance. Solidaire des Français d?Algérie, mais sensible à la misère des musulmans et hostile à une répression aveugle, Camus vivra cette guerre comme une tragédie.
En mars 1955, il crée une adaptation d?Un cas intéressant, pièce de Dino Buzzati. Il revient au journalisme en collaborant à L?Express.
En janvier 1956, il fait un bref séjour à Alger pour lancer un appel à une trêve civile entre Français d?origine et Français musulmans. En février, il cesse sa collaboration à L?Express, sans doute parce qu?il ne peut accepter la ligne politique du journal, de plus en plus favorable à l?indépendance de l?Algérie.
En mai, est publiée La Chute, qui connaît aussitôt un grand succès. En septembre est créé au Théâtre des Mathurins, à Paris, Requiem pour une nonne, pièce adaptée par Camus, d?après l??uvre du romancier américain W. Faulkner. En novembre, les chars soviétiques répriment la révolte des Hongrois, à Budapest. Sartre dénonce la faillite du communisme importé d?URSS et rompt avec le Parti communiste français.

Consécration et dernières années

     En mars 1957, Camus publie L?Exil et le Royaume, recueil de nouvelles dont La Chute devait à l?origine faire partie. Au Festival de théâtre d?Angers, en juin, est créée son adaptation du Chevalier d?Olmedo, de Lope de Vega. II publie des Réflexions sur la guillotine, qui font partie de Réflexions sur la peine capitale, en collaboration avec Arthur Koestler et Jean Bloch-Michel. Le 17 octobre, il se voit attribuer le prix Nobel de littérature. Il est le neuvième Français et le plus jeune à recevoir cette distinction.
En décembre 1957, à l?occasion de la remise du prix, il prononce le Discours de Suède, réflexion sur les rapports de l?artiste avec la société qui l?entoure. L?Envers et l?Endroit est réédité avec une nouvelle préface (rédigée en 1953 ou 1954). Des « chroniques algériennes », réunies dans un volume intitulé Actuelles III, sont publiées en juin 1958. Elles se concluent par l?appel à un fédéralisme qui garantirait la spécificité de l?Algérie tout en la maintenant dans la France. À cette date, le général de Gaulle a été appelé au pouvoir. Il va fonder la Cinquième République, puis mettre en route le processus d?autodétermination, qui aboutira en 1962, à l?indépendance de l?Algérie.
À la fin de l?année 1958, Camus achète une maison à Lourmarin (commune du Vaucluse), où il s?était déjà rendu plusieurs fois.
En janvier 1959, il assure lui-même la mise en scène de son adaptation des Possédés, de Dostoïevski. Vers la fin de l?année, à Lourmarin, il a plusieurs projets en train, mais il travaille surtout au Premier Homme. Il en rédige d?une seule traite, semble-t-il, la première partie (« Recherche du père »).
Le 4 janvier 1960, il rentre à Paris dans la voiture de Michel Gallimard. À moins de cent kilomètres de Paris, sur la Nationale 6, entre Sens et Montereau, la voiture fait une embardée inexpliquée. Albert Camus est tué sur le coup. Il est enterré à Lourmarin.

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