COURS DE CULTURE GENERALE SUR L’ANARCHISME

 

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I) L’ANARCHIE, L’ANARCHISME : DEFINITIONS

II) L’ORIGINE DE LA PENSEE ET DU MOUVEMENT ANARCHISTES

III) LA DIVERSITE DE L’ANARCHISME

IV) L’UNITE DE  L’ANARCHISME: LES IDEES FORTES

 

 

I) L’ANARCHIE, L’ANARCHISME : DEFINITIONS

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- Ne pas confondre l’anarchie et l’anarchisme

 

   * l’anarchie (an/arkhê) = état de désorganisation, de désordre d’une société résultant de l’absence d’autorité et de gouvernement;

 

   * l’anarchisme : conception politique, philosophique et morale, voyant dans le pouvoir de l’Etat le mal absolu car il se constituerait contre la liberté humaine. Les anarchistes, c’est-à-dire les partisans de l’anarchisme, entendent abolir l’exploitation de l’homme par l’homme.

 

Þ dans ce sens, l’anarchie, pour un anarchiste, est à la fois “ le plus colossal des désordres, la désorganisation la plus complète de la société et…la constitution d’un ordre nouveau, stable et rationnel, fondé sur la liberté et la solidarité “ (Daniel Guérin, in L’anarchisme) Þ pour reprendre la belle formule de Léo Ferré dans l’une de ses chansons, “ le désordre c’est l’ordre moins le pouvoir”.

 

 

II) L’ORIGINE DE LA PENSEE ET DU MOUVEMENT ANARCHISTES

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- Doctrine et mouvement politique apparu au XIXème siècle (même contexte historique et culturel que le marxisme) Þ critique, avec le marxisme et la pensée socialiste en général, du libéralisme économique et politique et du système économique capitaliste.

- Les pionniers de l’anarchisme sont :

 

    * Max Stirner (1806-1856) : il exalte l’Individu créé en un seul exemplaire, la valeur de l’unique. L’Individu doit s’affranchir de ce qui lui est inculqué par la famille et l’éducation : rejeter Dieu, les lois, tout ce qui aliène l’unicité de l’Individu.

 

    * Proudhon (1809-1864) : il affirme, au nom de la Justice, que la “propriété c’est le vol”, puisqu’elle permet au fort d’exploiter le faible. Il condamne également l’Etat qui, échappant au contrôle de l’Individu, fait peser sur lui   une autorité insupportable. Théorie féconde de l’autogestion et du mutuellisme.

 

    * Bakounine (d’origine russe) : l’Etat doit être détruit et la propriété collectivisée . Pour ce faire, nécessité de la révolution. A approuvé le recours au terrorisme, “la propagande par le fait”, stratégie prônée par les anarchistes à la fin du XIXème siècle.

 

- Les anarchistes ont joué un rôle important dans la 1ère Internationale (le conflit Marx-Bakounine), dans le mouvement syndical français , italien et espagnol à travers ce qu’on a appelé “l’anarcho-syndicalisme” : les anarchistes ont contribué à la séparation entre l’action syndicale et l’action politique (charte d’Amiens de 1906); ils ont attaché une importance toute particulière au travail éducatif que le syndicat se doit d’accomplir auprès de ses militants.

 

- Influence considérable également pendant la révolution espagnole : lors de la république espagnole, existence d’organisations syndicales d’obédience anarchiste puissantes : la CNT (Confédération Nationale du Travail) et la FAI (Fédération Anarchiste Ibérique) sont les groupes syndicalistes majoritaires de l’Espagne républicaine. Rôle héroïque pendant la révolution espagnole proprement dite.

 

- Après la fin de la guerre d’Espagne, le mouvement anarchiste connaît une période de déclin. Il renaît dans les années 70 au sein de la jeunesse universitaire surtout, en mai 68 notamment.

 

- Les anarchistes sont aujourd’hui présents dans des lieux aussi multiples que divers :

         * des organisations politiques (ex : la Fédération anarchiste, en France, l’AIT, sur le plan international);

         * des organisations syndicales ( la CNT, en France);

         * des associations (antiracistes et antifascistes, par exemple : le SCALP);

         * radio : “radio libertaire”;

         * théâtre : TLP à Paris;

         * l’éducation (l’école Bonaventure à Oléron, 35 allée de l’Angle);

         * la rue, les quartiers, etc;

         * la musique :

 

             ® fin des années 70, le mouvement punk : contestation de la société, critique du show business;

             ® début des années 80 : rock alternatif issu du mouvement punk, de la BD, du polar, des idéaux de mai 68 (ex: “les béruriers noirs”). On retrouve dans le rock alternatif toutes les valeurs de l’anarchisme : antifascisme, antimilitarisme, haine de la police, des partis politiques, etc. Il revendique également la liberté de production, ,de distribution, s’organise dans des associations de concerts , des labels, des salles de répétition, etc.

 

 

III) LA DIVERSITE DE L’ANARCHISME

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- 3 grandes sensibilités qui expriment des divergences d’interprétation quant aux moyens de construire la société anarchiste : l’anarchisme individualiste, le communisme libertaire ou anarcho-communisme, l’anarcho-syndicalisme. Chacun de ces courants est lui-même habité de multiples sensibilités : pacifisme, libre pensée, végétarisme, féminisme, etc.

 

       * l’anarchisme individualiste (courant issu de la pensée de Max Stirner et représenté par des individus sans appartenance organisationnelle : exemple de Léo ferré) ® la liberté individuelle est garantie par le maintien de la propriété privée; l’anarchisme est considéré avant tout comme une position d’esprit; ceux qui se reconnaissent dans cette sensibilité font le choix de l’isolement car ils voient dans toute organisation des sources de contraintes et de dérive bureaucratique;

 

        * le communisme libertaire (Proudhon, Bakounine, Kropotkine, Elisée Reclus, Emile Pouget, Sébastien Faure , Enrico Malatesta) : le bien-être et la liberté exigent l’abolition de l’appropriation privée et la mise en commun du sol, des matières premières, des biens, des moyens de production, etc. (communisme) ; nécessité de détruire l’Etat et ses institutions (s’oppose au communisme dit autoritaire, incarné par le marxisme);

 

        * l’anarcho-syndicalisme : mener le combat anarchiste à l’intérieur du mouvement ouvrier dans les syndicats (CNT en France, par exemple).

 

- Il y a également un anarchisme chrétien (Tolstoi) dont l’idée-force est consituée par la “non-violence”.

 

- Il faut préciser que les anarchistes qui choisissent l’organisation ne se référent à aucun modèle unique : les uns préfèrent oeuvrer dans une organisation anarchiste spécifique (la FA, par exemple), les autres par le syndicat ou l’association, d’autres encore à la fois dans l’organisation spécifiquement anarchiste et dans les organisations de masse.

 

 

IV) L’UNITE DE  L’ANARCHISME: LES IDEES FORTES

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- Si l’anarchisme est diversité, comme la plupart des grandes doctrines politiques, il est aussi unité dans les valeurs, les principes, les idées qui le fondent .

 

- L’idée centrale est le primat accordé à la liberté individuelle, laquelle est considérée comme étant inaliénable : place irréductible de l’individu qui est le seul absolu et qui doit prôner sur le collectif Þ  D’où le refus de la contrainte de l’Etat, la revendication de l’égalité économique, sans laquelle l’égalité politique est illusoire, et de la suppression de la propriété privée Þ combat contre toutes les formes d’exploitation de l’homme par l’homme . Idée que l’entraide et la solidarité doivent servir de base à l’organisation de la société et permettre de rompre avec les pratiques égoïstes et dominatrices. D’où un certain nombre de rejets caractéristiques de l’anarchisme :

 

A) Le rejet de l’autorité, considérée comme l’instrument d’une domination sur le peuple, et de ses “gardes-chiourme”, les institutions politiques, familiales, religieuses,etc. S’affranchir de tout ce qui est sacré et qui aliène l’individu.

 

B) Le refus de l’Etat qui, par ses injustices et ses violences, est fauteur de désordre et d’oppression Þ l’opposition entre l’Individu et l’Etat est radicale. Tout Etat est une tyrannie, fût-il de nature démocratique. Dénonciation, par Proudhon notamment, de la gigantesque machine administrative de l’Etat moderne qui absorbe et règle la vie des individus au sein de la société.

 

C) Démystification de la société bourgeoise Þ la souveraineté du peuple n’est qu’une fiction, une illusion : elle est déléguée entre les mains d’une “aristocratie gouvernementale” exerçant le pouvoir au nom du peuple, mais contre le peuple. Duperie du suffrage universel : si le peuple était réellement souverain, il exercerait lui-même le pouvoir sans gouvernement ni Etat Þ antiélectoralisme qui s’exprime concrètement par le refus de participer à la mascarade électorale (“élections piège à cons”).

 

D) Refus de la religion (“ni Dieu ni maître”) : anticléricalsime (contre l’influence des clergés dans les affaires publiques); athéisme (négation de l’existence de toutes divinités qui sont de purs produits de l’imagination humaine) Þ la religion dépossède l’Individu de sa responsabilité et de son individualité : croire en Dieu, c’est se donner un maître. L’église est un moyen de dominer les peuples dans la soumission; elle joue le même rôle que l’Etat.

 

- Mais l’anarchisme n’est pas uniquement une doctrine négative ou réactive; il présente une conception de l’ordre social sans recours à la contrainte et à l’autorité. Il s’agit de trouver une forme d’autorégulation naturelle de la société Þ l’autogestion, le fédéralisme, le mutuellisme :

 

A) L’autogestion

 

- Idée que les hommes devraient s’unir pour gérer eux-mêmes la vie sociale, économique, politique et culturelle dans des associations. Les travailleurs associés doivent gouverner l’industrie. Il n’y a plus d’économie de marché et de domination autoritaire, c’est la population qui décide et valide les grandes orientations. Disparition de la propriété privée des moyens de production au profit de la propriété d’usage (un individu est considéré comme propriétaire de biens lorsqu’il les utilise pour lui-même).

 

B) Le fédéralisme

 

- Principe essentiel de l’organisation économique et politique de la société anarchiste : la fédération des associations remplace l’Etat à tous les niveaux par la généralisation du principe de la libre association : il s’agit de coordonner des systèmes autogérés . Il y aurait alors des fédérations communales, régionales, fédérales, par branche professionnelle, par métier, par type de service (fédération du bâtiment, de l’électronique, de l’informatique, etc.) Þ modèle de démocratie directe : “le gouvernement de soi-même par soi-même”.

 

C) Le mutuellisme

 

- Créer des associations ouvrières conformes au thème de la mutualité des services (le principe de la mutualité : les membres d’un groupe, moyennant le paiement d’une cotisation, s’assurent réciproquement une protection sociale).

 

- Proudhon envisage la suppression de l’argent et la gratuité du crédit : l’argent sera remplacé par des billets de crédit gagés sur des produits dont la valeur est fonction du travail qu’ils représentent.

 

- Le crédit serait confié à une société mutuelle, réciproque de producteurs : Proudhon fonde, en 1848, la banque du peuple ® la banque constitue son capital en émettant des actions qui seront souscrites par ses clients; l’intérêt des sommes prêtées par la banque est réduit au taux strictement nécessaire pour couvrir les frais d’administration (entre 0,25 et 0,5 %).

 

- Le mutuellisme proudhonien a abouti en France, en Angleterre, aux états-unis à la création de coopératives et de sociétés de secours mutuel

 

             ® exemple, en France, du système Leclerc qui comprend un ensemble de magasins effectuant des ventes à faible marge.

 

             ® le projet autogestionnaire est central dans nos sociétés depuis les années 60 (expériences autogestionnaires en           Yougoslavie, en Algérie, en France avec l’affaire Lip dans les années 70).

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