An other Theory of the ChaosThe Silence

Au fond dans ma mémoire, hors la croix élevée en fin du village et du bien, une berline sombre et massive emporte un éclat d'âme ensanglantée et l'image élastique de l'enfant aux genoux souillés d'espoirs, trempé aux larmes séchées, à l'indigence d'une époque qui, en ces temps de moindres moyens, faisait d'entre deux bourgs un voyage de la terre à la lune.
Pas à pas, reclus et distant de ce monde d'amertumes et finalement de moisissures de guerre ou de misère, le silence et l'attente ont réduit l'enfant sage en visiteur noctambule. Résumées en nuits charmantes de petites visites en grandes vacances enfumées blanches au tabac brun à rouler et aux volutes laiteuses d'un thé de tendre timidité, les années se sont écoulées au rythme d'une même mélodie, vinyle en pochette et fugues de Bach... Te souviens-tu mon amour ?
Sur nos bancs séparés, en adolescence, semblait-elle sans fin, l'amour s'est répandu sous nos pas comme un miroir de pauvres et trop bien retenus sanglots... Où en étais-je au juste ? Comment s'avoue l'amour lorsque l'indigence se porte aussi sur soi ? Alors, pour que le temps ne chasse rien d'un si mélancolique ouvrage, trois ou quatre mots pour changer la face du monde : " Je t'aimerai toujours ! "
Et nous voilà en ce siècle, larmoyant ces tranches de petits bonheurs sensuels comme frissons d'émotions, de désirs... Oui. Où en étais-je au juste ? Comment s'avoue l'amour lorsque tout est promis à d'incessantes séparations, à d'autres indispensables ? Comment vais-je échapper du contrôle ?

Preceding Text

Déchirures mortelles, Roméo et Juliette, engelures aux lèvres, godillots et cendrillon, coeurs engrossés, peines et sentiments égarés que l'âge ne soutient pas encore... Haaa ! Nul besoin de verbes, l'amour enluminait seulement nos âmes et entrelaçait pour toujours nos yeux découpés dans le bleuet d'un même horizon, jusque dans le regard des autres qui n'y survivront pas.
- Mon dieu ! C'est sans cesse un matin d'automne !
 

James Gilles Galeron 2002/03